Interview Bertrand Coty
Pascal Borie, Celina Rocquet, vous publiez chez DBS, Managez comme un pilote, un recueil de conseils sur le management en période d’incertitude. Quel est le lien entre pilotage d’un avion et management ?
Pascal
On peut considérer un vol comme un projet ou une entreprise. En effet, il s’agit de transporter d’un point A à un point B des passagers et des biens en toute sécurité. L’équipage de l’avion est chargé de ce projet, comme l’équipe que gère le manager. Et comme dans une entreprise, il s’agit pour le commandant de bord de manager cette équipe afin d’atteindre l’objectif.
Celina
Dans le monde des organisations, le manager doit porter une équipe ou un projet avec succès en optimisant au mieux le facteur humain qui lui est indissociable. L’entreprise aujourd’hui évolue dans un environnement économique, concurrentiel ou réglementaire incertain. De nombreux facteurs externes et internes complexifient son développement. Les décisions peuvent devoir être prises rapidement. C’est dans ce contexte que nous avons souhaité apporter des méthodes simples, des façons de faire éprouvées et très pragmatiques pour gagner en efficacité.
La prise de décision en matière de pilotage est-elle reliée à des méthodes précises et lesquelles ?
Pascal
En effet, l’équipage se base sur des méthodes et des dispositifs tels que les briefings et les check-lists pour faciliter la prise de décision la plus judicieuse dans un temps toujours contraint. L’intégration de ces outils est inculquée dès la formation initiale et doit être exercée avec une rigueur exemplaire.
Les briefings servent à s’assurer que tous les membres de l’équipage ont la même compréhension de la situation et qu’ils partagent les mêmes intentions sur les actions à venir.
Les check-lists permettent aux membres de l’équipage de s’assurer qu’ils n’oublient aucune étape critique dans les actions qu’ils doivent réaliser et qu’ils réagissent de manière appropriée en cas de problème.
Celina
Ces outils sont extrêmement précieux pour un manager, car cela peut lui permettre de gagner du temps, améliorer la communication au sein de son équipe, et donc la performance de celle-ci pour atteindre les objectifs fixés. Finalement, on simplifie au lieu de complexifier et cela entraîne une meilleure fluidité dans les interactions tout en limitant les risques.
Certains managers aujourd’hui se retrouvent parfois à ces positions, car l’entreprise les promeut par reconnaissance de leur qualité de travail. Mais ce n’est par ce que l’on est expert d’un sujet ou excellent dans un domaine, que l’on peut devenir manager du jour au lendemain. Il est tellement utile et souvent nécessaire de pouvoir s’approprier des méthodes de travail et des outils qui simplifient la vie du manager. C’est notre objectif en partageant cet ouvrage.
Votre livre comprend des aspects pratiques. Pouvez-vous nous en parler ?
Pascal
Le livre aborde par exemple le briefing avant décollage dont la structure est normée. L’objectif est pour le pilote de partager ses intentions et de s’assurer qu’elles sont bien comprises par l’équipage.
Dans un autre domaine, l’ouvrage aborde la méthode de traitement d’une panne qui suit aussi un processus normé et rigoureux.
Celina
Dans l’entreprise, les procédures peuvent parfois sembler rébarbatives, mais il faut au contraire les considérer comme des aides, un moyen de supprimer le superflu qui peut être nuisible au bon fonctionnement d’une équipe, entraîner une mauvaise communication ou laisser une trop grande place à l’interprétation. Dans ce livre, le manager découvrira, s’inspirera et s’appropriera des moyens faciles à mettre en œuvre dans son quotidien.
Nous avons en tête le pilotage automatique. Selon vous, la formule : « Back to the basic » est-elle de mise aujourd’hui ?
Pascal
Absolument. Les parallèles entre le management et le pilotage d’un avion sont frappants. Les pilotes insistent sur l’importance fondamentale de « maintenir l’avion en vol ». Cette affirmation sous-entend que, quelle que soit la situation, qu’il s’agisse d’une défaillance technique ou d’un imprévu en cours de vol, tant que l’avion continue de voler, la situation n’est pas nécessairement désastreuse.
Par exemple, une panne de moteur peut sembler être une situation critique, mais en réalité, elle peut être gérée de manière efficace lorsque l’équipage suit les procédures spécifiques de gestion de cette défaillance, tout en gardant à l’esprit que l’avion a été conçu pour fonctionner avec un moteur en moins.
Celina
Parfaitement d’accord. On oublie trop souvent de revenir à l’essentiel, à des choses simples et évidentes. Le bon sens n’est souvent plus de mise, alors qu’il est au cœur de nos activités. Back to basics, c’est une excellente expression pour exprimer une manière de fonctionner plus simple, plus évidente, plus efficace. A-t-on d’ailleurs encore le temps de perdre du temps dans des interprétations, langages ambigus, postures non claires, et autres facteurs qui sont à la source de stress et d’erreur ?
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CELINA ROCQUET est consultante formatrice en Innovation. Responsable et anime des conférences et des séminaires. Manager depuis plus de 20 ans en entreprise, elle a aussi cofondé plusieurs start-ups, avec une approche soft skills et RSE. Elle enseigne dans plusieurs établissements, dont l’ESI (École du développement durable) et Paris-Saclay.
PASCAL BORIE débute comme ingénieur et pilote d’avion de transport militaire au sein de l’Armée de l’air. Instructeur en vol et référent sur les Facteurs Humains, il a ensuite occupé différents postes au sein de la DRH avant de rejoindre en 2019, le monde des startups et de l’enseignement.
