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L’économie a-t-elle une âme ?

Réflexions sur les raisons systémiques des crises sanitaires et climatiques et propositions pour une économie féminine, consciente et animiste au cœur de la transition écologique.

Les politiques qui ont décidé des Plans de relance ont-ils eu une réflexion philosophique sur les raisons profondes des crises sanitaire et climatique ? Et si à la racine, on trouvait l’espèce humaine qui a cessé d’octroyer une âme à chaque élément de la nature. Nous sommes DE la nature, pas A CÔTE D’elle. Et si la cause de ces crises résidait dans notre atrophie spirituelle ? Dans son livre « L’Économie a-t-elle une âme ? », Marc Lemaire nous propose de concevoir une économie féminine, consciente et animiste.

Les plans de relance face à la crise du vivant

L’ouvrage montre que l’économie mondiale n’arrivera pas à diminuer suffisamment sa voilure « carbone » pour arriver aux accords de Paris. Nous atteindrons + 3°C d’ici à 2050 et entrerons dans la zone dangereuse des ruptures d’équilibre planétaire. Au niveau de la biodiversité, selon l’IPBES (le GIEC de la biodiversité), ce sont des centaines de milliers de virus et zoonoses qui sont à nos portes si nous poursuivons notre mode d’exploitation des ressources naturelles. Nous sommes DE la nature, pas À CÔTÉ DE la nature. Détruire la nature, c’est par conséquent nous détruire nous-mêmes.

Malheureusement, les décideurs politiques qui ont planché sur les Plans de relance économique n’ont pas tenu compte des leçons de la crise sanitaire ; ils n’ont visé que la restauration de l’économie « business as usual ». Aucune réflexion philosophique ni anthropologique n’a sous-tendu leur vision. Quant à la gestion de la crise sanitaire, elle montre ô combien la non-acceptation du risque en général et notre peur de la mort en particulier se sont exacerbées ces dernières décennies.

Alors qu’avec le Covid, nous avons été prompts à édicter la fin de certaines libertés individuelles, parler de restrictions pour résoudre le problème climatique à long terme n’est toujours pas audible. Si la solution ne vient pas des politiques, si le modèle économique est incapable de se réinventer, si la technologie miracle n’a pas encore été trouvée, si les citoyens consommateurs sont trop asservis, d’où peut venir la solution ?

Plaidoyer pour une économie féminine, consciente et animiste 2.0

L’auteur a analysé les racines du problème et fait l’expérience de pratiques spirituelles qui apportent de l’espoir. En effet, Homo Sapiens fût animiste pendant des dizaines de milliers d’années, puis polythéiste et enfin monothéiste. Ce faisant, il s’est distancié de la Nature et il l’a dé-sacralisée jusque qu’à en avoir une relation purement utilitariste. À côté de notre mode de vie occidental forgé par une spiritualité anthropo-centrée, la pratique d’autres spiritualités éco-centrées (bouddhisme, indouisme, etc.) permet de regagner une paix intérieure et une souveraineté de comportement écologique et disruptive.

Sans faire de prosélytisme, l’auteur témoigne de sa pratique animiste et donne des clés au lecteur pour qu’il trouve sa propre voie. Il propose aussi un nouveau projet de société basé sur un récit autre que celui de la séparation et de la compétition. Son récit est celui des relations pacifiées aux autres humains et à une Nature re-sacralisée. La prise en compte des aspects ontologiques doit être au centre des débats et permet alors un renouveau des pratiques politiques et la conception d’une nouvelle économie :

  • consciente du présent où tout acteur économique est responsable de ses impacts à tout moment de sa vie ; alors que l’économie actuelle reporte la gestion des problèmes à plus tard et à plus loin. Il impliquera un changement des grandes profondeurs de nos sociétés ainsi qu’un nouveau contrat social et environnemental, afin d’accompagner les publics les plus fragilisés dans cette transition.
  • féminine (au sens du Yin) au service du Vivant dans l’éthique du ‘care’ (‘prendre soin de’). Dans celle-ci, dans une logique de croissance différentiée, certains secteurs économiques vont croitre (les services à la personne, l’économie circulaire, l’alimentation durable, la mobilité douve, le renouvelable, etc) et d’autres décroitre (le secteur minier, les industries carbonées, etc)
  • animiste dans le sens où la Nature y est re-sacralisée.

Pour ce faire, nous devrons abandonner l’économie néolibérale où les moyens de production appartiennent au capital (le Capitalisme), pour une nouvelle économie du vivant où les moyens de production appartiennent à la Terre puisque tout vient originellement d’elle (le Planétisme).

Alors que la durabilité s’est intéressée aux relations externes de l’entreprise (avec la nature, etc.), la conscience s’intéresse à l’intériorité de l’entrepreneur et de l’entreprise. Un nouveau type d’entrepreneurs, d’entreprises et d’économie conscients ou animistes pourraient naître. La spiritualité, la recherche de sens et le travail intérieur seront un de ses socles et redéfiniront les relations entre acteurs économiques, les règles du marché et les finalités de chacun. Quant à l’État, il devrait assurer notre souveraineté dans différents secteurs stratégiques et assurer la planification de feuilles de route pour atteindre des objectifs en termes de neutralité carbone et de régénération du vivant.

Le livre est préfacé par Adélaïde Charlier (Coordinatrice « Youth for climate ») et Sabine Denis (professeur invité à la Louvain School of Management – UCLouvain).

éditions ACADEMIA

Production BCCTous droits réservés 2023

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Ingénieur commercial et économiste rural, Marc est actif dans l’économie durable depuis 25 ans. Après avoir co-initié et dirigé plusieurs entreprises sociétales actives dans l'économie durable (Groupe One, EcoRes, Equilibre, Village Partenaire, etc.), il a été conseiller politique de trois Ministres en charge du Climat et président d’Inter-environnement Wallonie (Canopea). En 2019, il a co-fondé KAYA, la Fédération belge des écopreneurs. En 2010, à partir d’un événement personnel bouleversant, il a entamé son parcours spirituel et animiste à partir duquel il développera une réflexion pour résoudre la crise écologique.

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